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(Miniature) Rémi Bassereau : « Je sais que je peux être compétitif dans ce sport »
Photo : Beach Pro Tour
01/08/2023
Rémi Bassereau : « Je sais que je peux être compétitif dans ce sport »
Privé de son habituel partenaire Julien Lyneel, Rémi Bassereau va disputer les championnats d’Europe, cette semaine à Vienne (2-6 août), en compagnie d’Arnaud Gauthier-Rat, dont le binôme Youssef Krou vient également de se blesser. Malgré ce changement de programme, le Français de 24 ans est heureux d’avoir fait le choix de quitter la salle pour le beach-volley, il y a un an, avec Paris 2024 en ligne de mire. Un challenge qui continue de beaucoup le motiver.
On va commencer par la nouvelle la plus fraîche, tu vas jouer ce championnat d’Europe avec Arnaud Gauthier-Rat et pas Julien Lyneel. Que s'est-il passé ?
C’était un petit peu “limite” pour que Julien joue ces “Europe”, il soigne toujours son dos. Au début, on a pensé à me faire jouer avec un jeune, Tom Altwies, mais c’était limite au niveau des points. Et il se trouve qu’au dernier match, à Montréal, Youssef (Krou) s’est fait un petit quelque chose, et donc c’est moi qui en profite, je récupère son défenseur. Je devais être quatrième de poule, puis ensuite ne pas jouer, et maintenant je me retrouve avec Arnaud qui est tête de série de sa poule. On a trois jours pour se régler, ça devrait aller. Je pense que ça va matcher. De toute façon, on va voir dès le début si ça fonctionne bien. On se connaît déjà un petit peu, on s’entraîne ensemble, on sait à peu près ce que veut l’autre.

Le timing est néanmoins serré pour préparer ce tournoi ?
Oui, ce n’était pas du tout prévu. C’est vendredi que Youssef s’est fait mal, samedi soir il y avait de fortes chances que je joue avec Arnaud, dimanche on était inscrits. Hier (lundi), on s’est entraîné au niveau des passes. On va faire un peu de jeu aujourd’hui (mardi) et demain. L'avantage, c’est que nous ne sommes pas comme certaines paires qui ont des jeux très spécifiques, qui ont besoin d’une certaine vitesse de balle. Nous, on est assez polyvalents, on joue des balles assez hautes et universelles, je dirais.

Quel objectif peut-on se fixer dans ce contexte ?
Je ne sais pas, il faudrait demander aux coachs. Personnellement, sachant que le tirage est plus simple que celui d’avant (avec Julien, on avait les Italiens Ranghieri/Carambula et les Néerlandais Brouwer/Meeuwsen dans notre poule), j’espère qu’on pourra terminer premier de notre groupe, se qualifier directement pour les huitièmes et aller au moins en quarts de finale. Cela demanderait trois victoires de suite.

Vous allez commencer contre une paire autrichienne, devant son public, sur le Central...
Pour un premier match, pour deux mecs qui n’ont jamais joué ensemble, cela va être sympa (rires). Mais c’est à notre portée, il n’y a pas de raison. Il faudra être patient. Si ça ne marche pas sur le premier set, ça pourra marcher sur le deuxième. Il faudra un temps d’adaptation. Mais je suis confiant, je le sens bien, je m’entends bien avec Arnaud, il joue vraiment bien en ce moment.

Vous êtes dans le même groupe qu’une autre paire française, celles des frères Ayé, Quincy et Calvin. Sur le deuxième match, les vainqueurs du premier match s’affrontent, et les perdants sont opposés. Vous pourriez donc les croiser...
J’espère qu’on aura gagné, comme cela on sera sûrs de continuer le tournoi tous les deux. C’est toujours particulier de jouer contre des Français, parce qu’on se connaît par cœur, on se voit s’entraîner, on voit ce que fait bosser le coach. En plus, je me suis entraîné avec eux toute la semaine dernière, je sais exactement ce qu’ils font et comment ils vont (rires).

"C’est cool d’avoir la sensation d’avoir encore des choses à apprendre"

Cela fait maintenant un peu plus d’un an que tu as fait le choix de basculer de la salle vers le beach, quel bilan peux-tu faire ?
J'ai vu ce qu’il y avait sur le circuit, j’ai vu le niveau des meilleures équipes. Maintenant, j’ai tout vu, tous les styles de jeu, toutes les équipes, tous les joueurs. Maintenant, je sais que je peux être compétitif dans ce sport. Et c’est bien de le savoir. Quand tu arrives, tu ne sais jamais trop. Cela s’était bien passé pour moi en jeunes, mais peut-être qu’au niveau international cela pouvait être différent. Avec Julien, on a montré qu’on pouvait tenir tout le monde... ou perdre contre tout le monde. C’est un peu normal avec les nouvelles équipes, qui manquent de régularité d’un match à l’autre. Sur nos résultats, j’aurais bien aimé faire un petit podium sur les tournois qu’on a pu faire. Là, j’ai hâte de refaire des tournois, j’ai hâte de rejouer avec Julien, on a montré qu’on était capables de faire des trucs vraiment bien. Cela fait trois mois qu’on n’a pas joué, trois mois que je m’entraîne à fond. C’est un peu long, mais cela ne m’empêche pas de travailler et de progresser.

Et c’est un travail qui te plaît ?
Il y a tellement d’aspects où je peux progresser, et ça aussi, c’est agréable. En indoor, tu atteins vite un certain niveau, et ensuite tu perfectionnes ta technique, avec la machine à ballons, avec ton passeur, et tu joues souvent la même balle. Au beach, j’ai énormément de choses à apprendre, qui sont spécifiques au beach, des reculs de bloc, des défenses, des services tactiques, des types de bloc. C’est cool d’avoir la sensation d’avoir encore des choses à apprendre. C’est important, et très motivant. Et surtout, cela me donne de la confiance au niveau individuel. Quand je me suis lancé dans ce projet, je ne savais pas ce que j’allais faire après Paris 2024, c’était ma grande question. C’est toujours plus simple d’avoir une vie de confort, et de gagner plus d'argent en jouant en salle. Maintenant, je n’ai pratiquement plus d’hésitation, je pense que je resterai au beach. J’aime bien cette vie, et j’ai la sensation que je peux être plus impactant et dominant au beach. Pour être impactant et dominant en indoor, il faut vraiment être très physique, ou avoir un truc en plus, comme les Ngapeth, les Leon, etc. Au beach, tu sers tout le temps, tu bloques tout le temps, tu peux faire des deuxièmes mains, breaker plus, techniquement tu peux être beaucoup plus impactant, c’est la sensation que j’ai, et c’est plus valorisant, plus motivant. Au bout d’un an dans le beach, j’ai l’impression que, un jour, ça marchera pour moi. J’espère, j’y crois.

Tu savais que ce serait très différent de la salle, qu’est-ce qui t’as le plus surpris ?
Le “gap” physique est vraiment important, au niveau du cardio. Il faut jouer dans la fatigue. En indoor, on ne connaît pas cela, tu n’es jamais épuisé, même si tu joues cinq sets, enfin à mon âge (rires). Tu sens surtout la fatigue le lendemain. En beach, tu joues dans le sable mou, il fait parfois 35 degrés, il fait parfois humide... Là, au bout de cinq points, tu sens la fatigue. Là-dessus, par rapport au premier mois, je me sens mille fois mieux au niveau de la préparation, je ne pensais qu’il y aurait autant de différence. Et dans la tête, on ne se rend pas trop compte, mais au beach, tu ne peux pas t’énerver, ou penser à autre chose pendant une seconde. Les breaks arrivent tellement vite, et c’est tellement dur de breaker contre certaines équipes, que si tu lâches pendant une minute et que tu te loupes sur trois services adverses, c’est réglé, le set est fini. En indoor, tu peux te “cacher” un petit peu si tu n’es pas bien, en demandant au passeur d’avoir moins de ballons pour se concentrer sur la réception, ou au contraire au libero de prendre plus de place en réception pour jouer plutôt deuxième pointe. Au beach, tu ne peux pas vraiment faire ces ajustements tactiques.

Le mode de vie est radicalement différent, tu n’as plus qu’un seul coéquipier, il y a plus de voyages. Est-ce quelque chose que tu apprécies ?
Oui, ça me plaît. Comme tu ne joues pas pour un club, si tu veux aller t’entraîner pendant deux mois au Brésil, ou en Allemagne, tu peux. Ça donne une vraie liberté, tu peux aller t’entraîner avec d’autres équipes. Tant que tu es prêt pour tes compétitions, c’est le principal. J'aime bien aussi le fait que les entraînements soient individualisés, tu peux toucher à tous les secteurs, ça permet une progression beaucoup plus rapide. Quand tu es dans un groupe de 15, c’est plus difficile de faire des “spécifiques” tous les jours. Au beach, si tu as un trou d’un mois sans tournoi, tu peux très bien décider de ne bosser que la réception au milieu et l’enchaînement derrière, par exemple. Et j’aime bien aussi le fait que les coachs et les joueurs soient tous dans le même bateau. Au beach, il n’y a pas de remplaçant, le coach est obligé de compter sur toi. Je l’ai vu, en indoor, des coachs qui ne comptaient plus certains joueurs, et qui ne les aidaient plus à progresser, qui les laissaient un peu de côté. Au beach, c’est plus solidaire. C’est plus humain, aussi.

"Le système récompense la régularité"

As-tu bien pris tes marques dans le Beach Pro Tour, et son système de ranking, d’Entry Points ?
C’est assez spécial. On a eu de la chance d’être aidés au début par la FIVB, qui nous a donné des wild-cards pour préparer Paris 2024. Sinon, si tu n’as pas cela, c’est vraiment dur. Le système d’Entry Points (pour intégrer les tableaux des tournois, ndlr), c’est un sacré bazar. Ils l’ont changé récemment. Avant, je crois qu’ils prenaient la moyenne des 10 derniers tournois, tu avais le droit de faire des erreurs, d’avoir une mauvaise passe. Là, ça prend en compte les trois meilleurs résultats sur les quatre derniers tournois. Si tu loupes deux tournois, comme on l’a fait, tu te retrouves dans la sauce (rires). Notre but c’est de sortir des qualifications des tournois Challengers, de rentrer directement dans les tableaux, parce que les qualifs, c’est un enfer, le niveau est tellement serré, tellement aléatoire aussi. Parfois c’est une équipe locale qui s’est inscrite, parfois c’est une équipe qui vient de gagner un tournoi. Les Ayé, en qualifs au Brésil, sont tombés sur Alison (champion du monde 2011 et 2015, champion olympique à Rio en 2016, ndlr). Il a joué un seul tournoi, il avait eu une wild-card. Et il est encore très fort. Ce n’est pas toujours logique, mais il faut faire avec.

Comment s’adapter ?
C’est un système qui récompense surtout la régularité. Il vaut mieux faire trois quarts de finale de suite, qu’un podium et deux éliminations en poules. Parce qu’au moment où tu perds les points de ta grosse “perf”, c’est difficile. Au Brésil, on a réussi à se qualifier pour le Main Draw du tournoi Elite 16 d’Uberlandia. Mais pour les quatre tournois Elite 16 suivants, on n’avait même pas assez de points pour disputer les qualifications, parce que les tableaux étaient faits un mois à l’avance. Parfois il faut être stratège, ne pas jouer un mois où il n’y a qu’un seul tournoi, et se réserver pour le mois suivant où il y a trois tournois. Mais je ne sais pas si un système qui incite les joueurs à parfois ne pas jouer est un bon système...

Au-delà de ce championnat d’Europe, quels objectifs as-tu pour cette fin de saison ?
Notre grand objectif de la saison, avec Julien, ce sont les championnats du monde, et le Beach Pro Tour de Paris, si on a une wild-card. Ce sont des tournois qui peuvent permettre d’engranger beaucoup de points. Ensuite, il y aura une série de tournois Challengers en Asie. Notre but est d’avoir assez de points pour rentrer dans les Main Draws, et de ne pas passer par les qualifications, parce que cela change énormément de choses de commencer un tournoi un jour plus tard et avec deux matchs en moins dans les jambes. Au Mexique, quand on arrive contre les Suédois en quarts de finale, on a déjà joué trois matchs de plus qu’eux, c’est beaucoup. Après, mon objectif personnel est de décrocher une médaille sur un tournoi d’ici la fin de l’année, j'aimerais bien avoir une médaille.